"La guerre est un conflit armé opposant au moins deux groupes militaires organisés réguliers. Elle se traduit ainsi par des combats armés, plus ou moins dévastateurs et implique directement ou indirectement des tiers. Elle qualifie donc tous les conflits, qui ont pour principales caractéristiques, la force physique, les armes, la tactique, la stratégie ou la mort de certains de ses participants ou de tiers (civils, employés et membres d'associations humanitaires etc.)."
La guerre est banalisée, sécularisée. La guerre n'émeut plus personne si ce n'est lorsque des anecdotes tragiques parviennent jusqu'aux médias, que ce soit des prisonniers torturés, ce qui va à l'encontre des conventions de Genève où bien des soldats prenant des photos indécentes avec leur victimes etc. Notons le vocabulaire employé face à ce genre de "faits divers de la guerre": déshumanisation, lois internationales, morale, condition humaine, valeur de la vie, humanité. Il y a donc un rapprochement qui semble allez de soi entre la guerre et certains concepts plutôt humanistes. Il existerait donc des guerres justes et propres et des guerres injustes et sales.
Premier point: Le métier d'un soldat consiste potentiellement à tuer des êtres humains. Dès lors, il est absurde de parler de morale* ou d'humanisme, car aussi bien l'une que l'autre condamnent, sans appel, la violence faite à autrui. Il n'y a que l'éthique**, séculaire, qui l'authorise et qui cherche donc à l'encadrer. Une guerre peut donc être éthique, mais jamais morale, ni humaniste.
Deuxième point: Il existe une dichotomie entre la réalité perçue et la réalité réelle, entre les soldats que l'on envoie sur le terrain, et les autres, nous, les citoyens, les dirigeants, ceux qui ne sont pas confrontés aux combats. Pour mettre en lumière cette dichotomie je propose ici un exercice; il suffit de regarder la première illustration de cet article: l'explosion de la bombe nucléaire sur Hiroshima. En l'espace de 4 jours, 200 000 morts à 99,9% civils: sans doute le pire crime contre l'humanité jamais commis par un Etat. Mais que reste-t-il dans nos mémoires? La photo d'un champignon géant, impressionnante à regarder, dont on nous a tant racconté qu'elle était terrible, mais qui suscite peu d'émotion. Une photo presque jolie en fait, on pourrait la regarder avec plaisir. Voilà comment nous percevons la guerre. Comme quelque chose d'étranger, que nous ne connaissons pas. Dont on nous à raconté parfois que c'était terrible, et parfois que c'était glorieux (Cf. grande fresque américaine sur les guerres) mais dont en réalité nous savons peu de choses.
Au contraire, j'imagine que les soldats ou civils qui ont participé à une guerre savent qu'elle a une odeur, qu'elle a une colonne sonore qui n'est pas celle des films d'Hollywood, qu'on peut la toucher, qu'elle peut hanter des esprits pendants une vie entière. Cette guerre là, la vraie, on ne peut pas nous la raconter. Mais je vous invite à l'entre apercevoir en regardant le deuxième cliché de cet article, au fond. Je demande aux âmes sensibles de ne pas s'abstenir. Restez collé à votre écran, regardez la photo dans ses moindres détails, ce n'est pas du voyeurisme, c'est de l'information. C'est choquant? C'est horrible? C'est insoutenable? Inconcevable? Une nausée vous monte de l'estomac? Je pense que ceci signifie entre apercevoir la guerre. Et il est important, lorsque au cours d'une discussion vous soutiendrez une guerre quelconque, une guerre pour lutter contre le terrorisme, une guerre pour exporter la démocratie, une guerre pour liberer un peuple opprimé, une guerre pour restaurer l'économie, vous saurez que vous parlez de ça.
Maintenant que nous avons entre aperçut ce que pouvait être la guerre, que nous savons qu'elle ne peut être ni morale ni humaniste, Posons nous la question: peut-elle être juste?
Si par "juste" on entend Juris (du latin; le droit, la correcte application de la loi), oui, certainement, dans la mesure ou le droit de la guerre et les conventions de Genêve sont respectés.
Si par "juste" on entend Dikaion (du grec; la morale, ce qui est bien et ce qui est mal), alors non. Pourtant j'ai longtemps méprisé les pacifistes, idéalistes naïfs. Je pensais que la guerre faisait partie de l'histoire de l'humanité, qu'elle avait parfois quelques vertues économiques, ou même pacifistes! (Les bombes d'Hiroshima et Nagasaki n'ont-elles pas évité une troisième guerre mondiale?), qu'elle était ancrée dans la nature de l'homme. Mais le bien et le mal n'a rien à voir avec le droit, tout avec la morale, et celle-ci est intransigeante. Aujourd'hui je suis un pacifiste, contre la guerre, contre la violence, sans concessions aucune. Comprenez-moi bien, par humanisme j'aurais sûrement été deserteur en 1939, et certainement pas résistant armé en 1944. Ce n'est pas glorieux, mais c'est ainsi.
Je considère que le scandale ne se trouve pas dans le non-respect des conventions de Genève, mais au sein même de ces conventions qui encadrent le meurtre. N'est-ce pas là la négation de l'humanité?
A' l'éthique je préfère la morale. A' la raison d'Etat, je préfère la raison de l'Homme. A' la sauvegarde de la nation, je préfère la sauvegarde de l'Humanité.
* Morale = La morale est individuelle mais se prétend universelle, elle est généralement rattachée à une tradition idéaliste qui distingue entre ce qui est et ce qui doit être. Elle a souvent une origine qui se prétend extra humaine (divine).
** L'éthique st liée à une tradition matérialiste qui cherche seulement à améliorer le réel par une attitude raisonnable de recherche du bonheur de tous. Elle est collective (à un état par exemple) mais ne se veut pas universelle et à une origine humaine (l'éthique est le fruit de la raison, pas du dogme).
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